Last call

Heureusement que le vent à tourné et que je peux m’offrir deux jours de voile en finissant. Juste ce qu’il faut pour donner le goût de recommencer. Belle journée de voile que cette avant dernière qui m’amène à destination ou presque. Le Guide de Skipper Bob dit Vero Beach mais je connais assez le coin pour dire que je suis à l’ancre à moins de deux miles au sud du pont de Wabasso près de Orchid Island. C’est pas tout à fait Vero Beach mais je ne vais pas m’y arrêter comme promis de toute manière. En effet, quelques conversations avec ces gens du coin m’ont convaincu de me rendre quelques 10 miles plus au sud à Fort Pierce où il y a une Inlet des plus faciles et un ancrage juste à l’intérieur devant la Harbourtown Marina. J’ai même le nom du bateau et des personnes qui habitent dans cette marina et qui à Bruinswick, m’ont proposé de les contacter en arrivant pour utiliser leur quai pour y attacher mon dingy. Je vais peut-être en profiter.

Quoique, je doive faire attention et ne pas trop profiter de mon avantage d’avoir mon bateau en Floride. Après tout, ici, le sport favori c’est le golf. Pas pour rien que j’ai apporté es bâtons tout de même.

Je ne sais pas trop comment terminer le récit de cette saga. Pour les « teckies » je reviendrai avec les statistiques de la descente. Mais ce soir, je n’ai pas envie de faire des maths.

J’ai plutôt le goût de vous dire merci de m’avoir accompagné dans ce périple qui m’a permis de valider que j’aimais encore la voile et que j’étais encore capable d’en profiter. Ce n’est pas mon dernier voyage. J’en suis persuadé.

Pour l’heure, ce que je peux dire, c’est comme le suggérais W.T. Simmons un ontarien fort sympathique rencontré en route: « le voyage, c’est comme un bon livre que l’on ferme, satisfait de l’expérience vécue ». Pas de regrets d’être déjà arrivé; pas d’inquiétude qu’il y aura encore des occasions de plaisir semblable.

Buenna note tutti!

On se retrouve au printemps pour la remontée…

Troisième journée de convoyage de yacht

Après trois jours au moteur non stop, je comprend mieux ce que vivent ceux qui descendent des bateaux dans le Sud pour le compte des gens qui ont le moyen de ne pas se taper cette longue descente. Ou encore pour ceux qui sont si pressés de passer de travail à vacance à travail qu’ils n’ont pas le temps de prendre le temps de descendre doucement leur bateau vers la sud.

Faut dire que le plaisir des plages sablonneuses des Bahamas ou le dépaysement un peu plus marqué des Iles Vierges n’ont rien à envier aux méandres des Carolines ou même de la Georgie. Mais plus ordinaire encore, c’est le long droit de Jacksonville jusqu’à je ne sais où. Plus bas encore que ma destination à Vero Beach. Depuis que Manon est descendue, je file à moteur sauf pour quelques premières heures, depuis que le chemin s’est aligné en flèche dans le lagon à partir de St. Augustine qui est la dernière belle chose à admirer sur ce long stretch qui passe par Daytona et se poursuit jusqu’à ce soir à Melbourne. Au point que pendant les moments de vent de face plus fort de cet après-midi, je pouvais laisser P.A. s’occuper de la barre et venir m’abriter à l’intérieur jetant un coup d’oeil au passage de chaque marqueur pour m’assurer de ne pas en heurter un de front.​​​

Je ne suis plus qu’à une journée et demie de mon point d’arrivée et j’espère que la météo ne ment pas et me donnera les deux journées de voile promises en terminant.

À l’ancre devant le quai municipal de Melbourne, en compagnie de trois ou quatre autres passants, je profite d’un abri confortable du Sud en arrivant et du Nord-Ouest pour la nuit. J’écoute Tricot Machine et Mes Aïeux. Je dois avoir un petit coup de mal du pays tout à coup. Mais ça va vite passer, je retrouve ma blonde dans deux jours et je lui livre ses bâtons de golf. Nous allons changer de jeu pour quelques mois.

À moins qu’un petit goût de Bahamas nous prendrait en février… qui sait?!

On y est presque,,,

Je ne sais pas comment décoder mes sentiments à ce stade-ci. Je suis à quelques jurs de l’arrivée. Content d’arriver au terme d’un périple de plus de 5o jours. J’ai fêté mon cinquantième hier. Puis je vois la fin du plaisir arriver. Mais en même temps, je vois pointer le petit nez de ma blonde qui est là depuis quelques jours déjà et ça me stimule à parcourir les derniers miles.

Je dois avouer que le dernier stretch est plutôt direct et vent devant pour l’instant. Alors, c’est au mopteur avec P.A. Qui prend la relève et une randonnée plutôt prévisible. Le seul plaisir de la découverte c’est de constater comment les villes qui se suivent au nord de la Floride sont d’un caractère bien différent. J’ai pris des photos pour illustrer mon propos. Vous les retrouverez maintenant sur le diaporama du début.

Je n’ai pas photograĥié Jacksonville parce qu’on y est pas remonté. Il s’agissait de 8 Miles inutilement dans la mauvaise direction, et pour l’aéréoport et pour la continuation du lendemain. Mais pour y avoir passé à quelques reprises, je peux dire que c’est une ville tout à fait typique de toutes les villes modernes du monde avec ses gratte-ciels non différenciés.

Par contre, Ste-Augustine, la prochaine agglomération au sud est tout à fait atypique d’une ville américaine moderne. Vous remarquerez sur la photo que parmi les plus hauts édifices, figurent encore les clochers. Une petite ville mexicaine moyenne si on veut trouver à comparer. Elle se targue d’être le plus vieil endroit où on s’est installé en permanence en Amérique.

Vient ensuite Daytona Beach où je me suis arrêté pour la nuit qui déjà ressemble aux villes de villégiature floridiennes avec la série d’édifices à condos de 20 étages sur le bord de la mer. Trois escales, trois villes floridiennes, trois looks absolument différents. Quelque chose que l’on peut se permettre d’apprécier quand on aborde une ville à la voile, puisqu’on a pas à se soucier du nom des rues ou des échangeurs pour éviter le trafic. On peut tout simplement se laisser imprégner tranquillement d’une impression qui se forme au fur et à mesure qu’on appréhende le tout petit à petit, à 10 km heure. Comme si on y arrivait en marchant… ou presque.

Finalement je suis rendu à Titusville, à la hauteur du Cap Canaveral. De plus ne plus prés de la maison. D’ailleurs, je me rends compte que depuis que Manon est partie, je n’ai qu’une idée en tête, rentrer à la maison et retrouver ma blonde. Je roule à moteur depuis deux jours le vent dans le nez.

C’est vraiment le dernier stretch.

La voile ça s’attrappe.

Ma partenaire est partie ce matin. Manon est partie s’acheter un voilier de 24 ou 25 pieds. La semaine qu’elle a passée à bord l’a convaincue: elle veut en faire encore et encore. Nous avons eu un bon mix de voile et moteur pendant cette semaine. Puis une bonne douzaine d’aventures à raconter et se remémorer avec plaisir. À

Pour moi, c’est le plus bel hommage qu’elle ne pouvait pas faire de m’annoncer qu’elle était mordue à ce point. On a regardé ensemble sur Kijjiji et elle a trouvé deux options très intéressantes. Un Mirage 24 à Mont-Laurier et un Catalina 25 à Senneville. Si l’autre Manon qui était prête à en acheter un après seulement une nuit à bord à Albany est toujours sur son high, les deux Manon pourraient faire une bonne affaire en achetant ensemble le Catalina qui est beaucoup plus spacieux que le Mirage.

Je l’ai laissé dans son taxi qui la ramenait à l’aéroport de Jacksonville pendant que je prenais le canal en direction Sud dès 7h30 ce matin. Àprès une couple d’heures de moteurs puis de voile puis un long quart au moteur avec le vent devant, je me suis retrouvé à 22h30 à l’ancre entre les deux ponts au Centre-ville de Daytona Beach. Un peu fatigué après ma plus grosse journée 65 miles nautiques. Puisque le vent doit être encore du Sud demain, j’ai préféré poursuivre en soirée puisque le vent faibli légèrement en fin de journée. Quitte à faire une pause au milieu de la journée demain

Ce que je dois avouer, c’est qu’à 130 nautiques de ma destination finale, je commence à avoir plus le goût de retrouver ma blonde que de continuer à faire du bateau; surtout du bateau moteur. La météo prévoit que ça va tourner à l’Ouest lundi. J’espère. Ça me ferait une belle fin de parcours, deux jours au portant.

Je vais continuer jusqu’à Fort Pierce où je pourrai ancrer plus en sécurité qu’à Vero Beach selon les conseils des gens qui connaissent le coin. Puis de Fort Pierce, on sort directement en mer. Ce qui serait plus pratique que de faire deux heures de moteur à partir de Vero Beach. On pourrait même partir avec des amis pour une journée en mer et rentrer en fin d’après-midi. Une perspective intéressante.

 

Ils m’ont volé mon pont

Enfin, il ne me l’ont pas volé mais plutôt remplacé par un nouveau pont de 60 pieds, Ceux-là qu’on a pas besoin de faire lever ou tourner. Puis, le McCormic Bascule Bridge à Jacksonville Beach, c’était pas vraiment « mon pont » même si j’en garde un souvenir particulièrement vivant, même 20 ans+ plus tard. C’est devant ce pont qui ne se pressait pas de lever que mon ami Jacques et moi avions décidé de tourner à gauche dans la super Beach Marine marina juste avant de le traverser, pour une pause douche bien méritée que nous nous offrions quand nous avons descendu Maïté en 1988. Justement là où j’ai convaincu Manon de nous arrêter pour qu’elle soit près de l’aéroport demain matin pour son vol de retour.

Le lendemain matin, bien reposés et prêts pour la prochaine étape, nous sommes sortis de la marina et avons tourné à gauche vers le Sud dans le chenal de l’ICW. À plus ou moins 6 Nds, avec le courant nous étions à effectuer les derniers rangements et je me souviens très bien d’avoir été en train de régler la longueur de la corde du dingy pour une traînée minimum quand soudainement, j’ai senti mon bateau se cabrer vers le haut de l’avant et le tableau arrière couler sous le niveau de l,eau et embarquer une vague incroyable… surtout en eau calme d’un chenal.

Vite la chaudière pour vider le cockpit et une autre pour écoper l’eau qui était entré à l’intérieur par le panneau de descente. Tout ça avant même d’investiguer qu’est ce qui avait pu produire cette embardée qui avait vu Maïté retrousser du nez au point de se remplir par l’arrière. Jusqu’à ce que je me rende compte que ce qui nous tenait en équilibre précaire sous un pont à bascule qui ne s’était pas levé pour nous laisser passer tout simplement parce qu’on avait jamais demandé… parce que nous avions complètement oublié qu’il était là, à gauche, en sortant de la marina.

Le mat tenait toujours grâce au fait que Maïté avait été grée en tige de métal plutôt que le fil habituel pour plus de performance en course et beaucoup plus de rigidité par le fait même. En fait, il tenait le mât du bateau appuyé sous la structure du pont et poussant celui-ci à caler de l’arrière juste assez pour garder le cockpit plein d’eau. C’est à ce moment-là que l’opérateur du pont,penché par dessus la passerelle a posé cette question qui me raisonne encore en tête: « Do you want me to open the bridge? » Littéralement: « Veux-tu que j’ouvre le pont? » Sur le moment, j,ai cru qu’il voulait se moquer de moi. Puis, je me suis rendu compte qu’il était inquiet de savoir si nous étions accrochés dans sa structure au risque qu’il nous sorte de l’eau en levant son pont. Alors, je lui ai répondu avec l’air le plus désinvolte possible: «  Bien sûr, quand vous serez prèt! »