Dimanche le 29 janvier

Y a des dimanches comme celui-ci où un gars aurait mieux fait "d’aller à messe pi rentrer à’ maison pour r’garder deux games de football à’ télé".

Tout à bien commencé samedi en fin d’après-midi quand Gary Hall, le proprio du grand bateau en alu m’a invité à monter à bord pour regarder les cartes météo qu’il vient de télécharger via son téléphone satellite. Le front qui passe présentement va nous permettre de faire de la route vers l’est, un cadeau. Tôt dimanche matin il va souffler de l’ouest puis virer au nord et forcer pour qu’elles heures puis s’établir à moins de 20Nds pour les trois prochains jours. Suffit de passer l’extrémité du Cap San Antonio à moteur face à ce vent d’ouest pour une heure puis on est portant pour se rendre à Isola Juvendud (l’île aux Pins) à 120Mn de la Marina Los Morros que je quitte avec nostalgie. J’y ai rencontré du bon monde. D’abord Abel, le Maître de Port, puis Osvaldo qui m’a vendu une belle grande chaudière pour remplacer celle dont l’anse s’est brisée par dessus bord. Puis, un dîner fort sympathiques avec Garry et Karine qui, après Juvendud, s’en vont à Panama en passant par les Caïmans pour les provisions.

Donc 7h am, je largue les amarres et me lance à l’attaque du vent d’ouest qui a plutôt l’air d’avoir commencé à virer au nord. Je tente de hisser la Grand’voile avec deux riz pour stabiliser le roulis que déjà le vent fort qui la fait fasseiller le temps que je la hisse, a détaché la bordure sur 18po de long. Vite affalée, mais le mal est déjà fait : une demie-heure de petits points en perspective et un arrêt à Annapolis pour la remplacer par une un peu moins vieille car, c’est pas la première fois qu’elle me fait le coup.

Prendre la Cap assez largement pour éviter les hauts fonds puis vogue la galère avec un petit bout de génois ouvert et le moteur en appui jusqu’à ce que ça se stabilise de l’autre côté. Mais voilà que c’est juste un peu trop galère. Je dois faire une pause pour laisser passer le plus gros de ce coup de vent du Nord. Dès que je passe au sud du Cap, c’est impossible de continuer comme ça. Les bourrasque sont plus que les 30 Noeuds prévus. Je me rapproche de la falaise et je mets l’ancre aussi près que possible pour ne pas trop me faire brasser. À 500 Mètres d’un petit chalutier échoué depuis un bon moment selon son état avancé en rouille.

Vers 16h, le vent semble avoir baissé un peu. C’est le temps de lever l’ancre et reprendre une mer plus facile. Oh! Surprise. Il n’y a plus d’ancre, ni de chaîne au bout de la corde effiloché. Un requin l’a mangé. Ou plutôt une tête et corail. J’étais si bien prorogé du vent que je ne tirais plus sur la corde; ce qui a créé cette situation. Heureusement que j’ai des rechanges, mais cette Delta travaillait bien. Et je n’ai pas de chaîne à mettre sur la prochaine. Ce sera la Forteresse alors. Cette petite ancre en alu peut fonctionner sans chaîne pour l’instant.

Je n’ai plus le choix : "Hit the road Jack"! On s’en va à la prochaine ile. Y a rien de plus près.

Puis c’est le temps et tester une idée que j’ai en tête depuis que mon génois à commencé à plumer et qu’il me semble moins solide. Je sort ma meilleure voile, un foc qui n’a presque jamais servi. Il est coupé pour le gros temps. Si j’en faisait une trinquette, cette deuxième voile avant que l’on retrouve sur les cotres. Le défi c’est que je n’ai pas de deuxième étais sur lequel la hisser. Qu’à cela ne tienne, elle est munie d’une ralingue métallique. J’attache le point dans sur la bite d et je la hisse libre, sans étai.

Bien croyez-le ou non, ça fait deux jours complets, un peu moins de 48 heures, au près serré qu’elle me tire vers Cayo Largo. 200MN sans escale à l’île aux Pins comme prévu. SurpriseS s’est transformée en votre.

Je me débrouille assez bien avec les quarts durant la nuit. Dans ce vide complet de circulation maritime, j’ose appliquer la technique des navigateurs solitaire : les" cat naps", ces petits soleils légers d’une vingtaine de minutes aux heures. On n’a pas le temps de s’endormir profondément, mais on est plus en forme le matin.

Ce qui tue le matin au réveil, c’est de découvrir penaud la corde de l’annexe sectionnée sur le taquet. Non mais, les annexes et moi… Et Frédéric qui m’avait donné son vieux dinghy n’avait eu qu’un seul regret : sa corde flottante qu’il aurait aimé conserver. Oublie ça mon chum. C’est pas solide ces cordes-là.

Ceci étant dit, ça va changer mes plans car, au quai de Juventud, là où je me dirige, on ne peut pas amarrer et on doit aller chercher la Guarda Frontiera par nos propres moyens pour les formalités à bord. Puis , il n’y a rien sur place pour l’approvisionnement. On doit prendre le bus pour aller à une charmante période ville à l’autre extremité de l’île. Je n’ai plus de propre moyens, je passe. Heureusement que j’avais pensé me procurer deux bidons de réserve d’essence. Avec 150 litres, Cayo Largo est à ma portée. Un autre 100MN en perspective. Heureusement que j’ai découvert la technique des petits dodos aux heures.

Andiamo a Cayo Largo!

Après une deuxième nuit tout à fait semblable à la précédente, je suis en approche du chenal qui mène à la Marina à partir du large. Sur la carte, il! Semble bien balisé et même drogué vers la fin. Ça fait un bon moment que je n’avais pas fait un tel passage en solo. Je suis un peu fatigué, je me sens collant et mon bateau aussi, en dedans comme en dehors. On a besoin d’une bonne douche tous les deux.

Post Script
Ce que je n’avais pas prévu au montant où j’écrivais le dernier paragraphe, c’est que les gens qui allaient venir attrapper mes amarres au quai de la Marina Cay Largo allaient le faire en français en m’appellant par mon prénom. Non mais faut le faire.

C’étaient des très grands amis de Guillaume, Anso et les petites du Voilier Oleo qui sont dans le Guide des Bahamas, dont je vous ai déjà parlé. Vous imaginez la boucle! 😊

Ma première gorgée de bière

Vous souvenez – vous de ce charmant petit recueil de courtes nouvelles tout aussi délicieuses les unes que les autres? Bien j’aurais pu écrire celle-ci aujourd’hui.

Il est 15h15, je la laisse couler doucement dans ma gorge, goûtant au passage la saveur pétillante et bien refroidie du houblon. Je me suis décidé, au moment de venir ici d’investir un montant important dans un appareil qui a changé ma vie. Habituellement, je préfère ma bière tablette; ou si vous préférez température de la cale. Mais aujourd’hui, ancré à l’est de Cayo Bonavista, après avoir plongé pour un bain au Joy, complété avec un champoing à l’eau douce, elle est meilleure à 4°, la température de la bière des connaisseurs.

J’ai quitté la pointe ouest de Cayo Jutias ce matin tôt pour deux petites journées de voile assistées (moteur en appui). La météo ne prévois pas de vents au-delà de 15 Nds pour le reste de la semaine. On est déjà rendus au vendredi 27 janvier. Il y a une semaine nous traversions à partir de Key West. Il me semble que ça fait bien plus longtemps que ça.

Dans ce petit temps, si mon mousse me m’avait pas quitté à La Habana, je lui aurait préposé de faire une autre navigation de nuit pour atteindre Cabo de San Antonio l’extrémité Ouest de Cuba. Seul à bord, par contre, je préfère suivre les conseils du Cruising guide to Cuba et le faire par l’intérieur, avec un arrêt à mi-chemin. En effet cette section du lagon est bien profonde. Je n’ai jamais vu moins en 10pi d’eau, même en passant devant Punta Tabaco, la section la moins profonde.

Ça m’a permis d’apprécier la limpidité de l’eau qui permet de bien distinguer les fonds, même par 25pi de profondeur. Peu de trafic de ce côté, si ce n’est 2 ou 3 petits bateaux de pêche, motorisés qui sillonnent le lagon qui s’élargit à l’ouest de Punta Tabaco. Y en a même un qui a fait addonner notre rencontre pour qu’on puisse se saluer de la main. 25Mn de pure bonheur de Cayo Julia’s à Cayo Buena Vista.

Le seul bémol: je vais devoir écouter le Buena Vista Social Club sur mon cell, ils sont à Varradero. Sonya et Alain sur "TILOUP" étaient tout exités de me dire combien ils les. avaient apprécié.

Dernière gorgée. Cheers!
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Vol de nuit

Bien je l’ai faite de toute façon ma traversée de nuit du vendredi soir. Je m’étais ancré à l’est de Buenavista puisque les vents étaient de l’ouest hier soir. Mais voilà que deux heures du matin, ils soufflent de l’est, assez pour me réveiller. J’avais choisi de partir très tôt car, d’ici, je n’avais pas la moitié du chemin de fait pour Cabo San Antonio. Alors je lève l’ancre et on y va vent arrière pour les 45MN de route à faire. Le vent est doux, autour de 10 Nds. Je vais l’avoir d’abord au largue, ce qui est parfait sous génois seul car il va tourner et venir de l’arrière, profs suivent au cours de la nuit.

Le ciel clair est constellé d’étoiles, le plancton donne la réplique lumineuse dans la vague d’étrave, je file à 5 Nds, je serai à la Marina Los Morros à l’heure du lunch si la tendance se maintien.

En passant devant Punta Abacos 2,5 heures plus tard, je me dis que si je n’avais pas été si paresseux hier, c’est ici que je serais venu passer la nuit, exactement à mi-chemin de ma randonnée intérieure. Une route facile à suivre même de nuit avec l’aide de mon application de navigation Boating HD de Navionics, tout à fait détaillée, et précise avec ses lignes de sonde. Plus dispendieuse que ma Plan2Nav qui n’a pas dé-couvert Cuba encore. Mais la sécurité de voir l’image précise du fond de l’eau, ça n’a pas de prix.

À 45 minutes de mon arrivée c’est le "Bonhomme Sourire" des Cayos de la Lena sur bâbord qui est le premier à m’accueillir. Au terme d’une traversée de 65MN de nuit par vent arrière qui sont montés jusqu’à 20 Nds et ont soulevé des vagues jusqu’à deux mètres, je dois avouer que Charly Brown a fait un très bon job à la barre. Meilleure que, je ne l’aurait fait moi-même pendant 12 heures non-stop. Je commence à préparer mes amarres et à pratiquer ma phrase en espagnol pour demander de l’aide pour accoster : "Tango une necesita ayuda para el muelle de muelle"

Abel, le responsable de la marina ne réponds pas sur le Canal 16. Je crois que sa VHF est en panne. Mais il est là sur le bout du quai quand j’approche, la main sur ma corne de brume, prêt à me faire entendre. Pas nécessaire, il me fait un grand signe de la main de passer à l’ouest et ils sont trois pour attraper les amarres. Beau comité d’accueil souriant. Il s’exprime très bien en anglais et me guide vers la Guarda Frontiera et le bar/resto/dépanneur minimal. Il s’occupe de tout, même me prêter son cellulaire pour que je donne un coup de fil à Pénélope pour la rassurer.

Vous aurez compris qu’ici, nous sommes en territoire sans internet. Une manière de vivre à redécouvrir.

Tout se passe en douce et je dîne ce soir avec un américain qui est allé s’acheter un bateau en alu en France pour partir à la retraire autour du monde et son équipière du jour, une femme de la Baie Chesapeake qui a choisi ce mode de fonctionnement pour faire de la voile à l’aventure. On a pris une bière ensemble… More to comme…